Vocaloid ? Qu’est-ce donc ?

Sur cette vidéo, nous pouvons voir Hatsune Miku ("Hatsuné Miku" 初音ミク) chanter sur scène un de ses titres phares "World is mine" (Par Ryo/Supercell). Miku signifie « futur », hatsu « premier », et ne « son », son nom l’identifie donc « premier son du futur ».

Sauf que Miku n’est pas réelle ! Comment des millions de fans peuvent aimer cette chanteuse aux interminables couettes turquoise ? Miku n’est point un holograme 3D, mais projetée sur un DILAD screen transparent (une sorte de plexiglass fait pour la projection d’images), et est acompagnée par des musiciens jouant sur des morceaux composés par des ammateurs, devenus pour les plus doués, professionnels…

Accordez nous donc un peu de votre temps pour lire cette explication... :)



Illustration officielle de Hatsune Miku par Kei.

I) Le logiciel

Vocaloid est un logiciel de synthèse vocale sous la forme d’un logiciel MAO (Musique Assistée par Ordinateur). Les voix (voice bank) sont enregistrées avec des voix de chanteurs ou de comédiens de doublage (seiyus au Japon), puis après l’échantillonnage de la voix, elle est ensuite travaillée grâce à la technologie de Yamaha.

Après portage dans le logiciel, il est possible de former un chant avec paroles, différents timbres de voix ou autres effets pour rendre le chant naturel. Quand la voix est prête, parfois un design de personnage est associé à la voix pour rendre le logiciel plus sympathique.

Yamaha n’a pas le monopole de création de personnages Vocaloid, bien d’autres sociétés ont créé elles aussi des Vocaloids (Voice Bank + personnage utilisant la technologie de Yamaha) comme par exemple Crypton Future Media, inc., AH-Software, Internet-CO, Zero-G Limited,… La liste de créateurs de Vocaloid est longue.

L’utilisation du logiciel en lui-même est simple, mais la complexité vient des voix. Par exemple, la voix de Hatsune Miku est beaucoup plus simple à travailler que celle de Megurine Luka, car Luka a été créé pour des utilisateurs plus expérimentés.

Pour créer une chanson, l’utilisateur as devant lui une interface représentant un clavier de piano, ainsi il peut intégrer des notes sur différentes hauteurs, ou charger un fichier MIDI, ou VSQ qui est le format spécifique à Vocaloid (VSQX pour Vocaloid 3). L’utilisateur peut ensuite entrer des paroles et syllabes et modifier différents paramètres pour jouer avec la voix et la rendre plus naturelle ou même plus robotique, de même, des respirations peuvent être ajoutées ainsi que des « phonèmes cachés ».

Aujourd’hui, il existe une soixantaine de Vocaloid chantant différentes langues (Japonais, Anglais, Coréen, Espagnol, Chinois,…) et en français, grâce au projet CeviO ALYS de VoxWave !



Vocaloid 2 Editor, interface du logiciel Vocaloid 2.

II) Un peu d'histoire...

Les premiers Vocaloid étaient destinés à un marché anglophone en 2004. Ces Vocaloid n’avaient pas d’apparence fictive, et la première version du logiciel de Yamaha laissait à désirer alors que ses concurrents utilisaient une technologie plus avancée (comme Cantor par exemple). Leon, Lola et Miriam furent donc les premiers Vocaloid, créés par Zero-G.

Quelques mois après la sortie de ces derniers, Meiko (créée par Crypton future Media pour le marché Japonais) vit le jour et remportât un peu plus de succès que ses prédécesseurs. Cela s’explique par le fait qu’elle ait été dotée d’un avatar, et donc d’une apparence fictive lui conférant un charme absent des présent Vocaloid "sans visage". On peut également souligner son timbre de voix plus réaliste.

Dès lors, la recherche de réalisme, autant dans la voix que dans l’identité du personnage (physique et même caractère forgé par les fans au fil du temps) sera la clé du succès des logiciels Vocaloid: CFM (Crypton Future Media), après avoir vendu plus de 3 000 exemplaires de Meiko, décida de créer un nouveau Vocaloid en 2006, Kaito. Contrairement à son aînée celui ci ne bénéficia pas d’une grande popularité auprès des utilisateurs et se vendit seulement à 500 copies.

Cet échec contraindra les développeurs à ne plus créer de Vocaloid masculins, peu demandés à l’époque (contrairement à aujourd’hui où Kaito est un des Vocaloid masculins les plus populaires).



Artwork (par Mebae) de la chanson "Tell your world" du compositeur KZ/Livetune

Durant l’été 2007, une seconde version du logiciel vit le jour, qu'on appela tout simplement VOCALOID 2, pour marquer une "seconde génération". Après quelques mois de développement, le 31 Août, Hatsune Miku naquit.

Alors que 1000 exemplaires de vente étaient considérés à cette époque comme une réussite pour un Vocaloid, Hatsune Miku se vendit à plus de 40 000 copies ! La raison de ce succès ? Son design frais (jeune fille de 16 ans aux couettes turquoises), sa voix adolescente et les dernières technologies de Yamaha pour son logiciel (supérieur à ses concurrents à ce moment-là); qui séduisit beaucoup de compositeurs amateurs ou professionnels, en plus des artistes et autres personnes participant au phénomène encore aujourd’hui.

Cette pétillante jeune fille de 16 ans devint donc très rapidement un phénomène social d’une ampleur considérable au Japon. Elle apparut même dans une série de publicités pour la nouvelle Toyota Corolla, et de même une tenue pour un opéra Vocaloid (décembre 2012 au japon, 15 novembre 2013 en France) lui a été créée par Marc Jacobs, un des créateurs travaillant chez Louis Vuitton.



Photographie prise lors du concert "Mikunopolis in Los Angeles" en 2011, concert co-organisé par l’ANIME EXPO (équivalent de la Japan Expo en France)

La carrière occidentale d'Hatsune Miku s'est depuis bien lancée: à l’occasion du concert Mikunopolis in Los Angeles organisé par le comité Miku-Fes 2011 en association avec le ANIME EXPO 2011 et Toyota, elle interpréta le 2 juillet 2011 ses titres phares sur la scène du NOKIA Theatre de Los Angeles, devant 7100 fans.

Difficile de croire que celle que l’on appelle aujourd’hui la « diva virtuelle » n’aurait pu rester qu’une illustration sur la boîte d’un logiciel… Elle est l’image d’une artiste, mais elle en représente des millions.



Hologramme de Hatsune Miku sur scène (Concert: Final 39's Giving Day)

III) Le phénomène

Vocaloid est donc un logiciel, mais aussi un phénomène mondial : Tout le monde peut créer avec Vocaloid, que cela soit au niveau des paroles des chansons, la composition, les illustrations, les PV (équivalent des clips), le cosplay, les remixs, les danses, les covers (reprises)...

Depuis le Vocaloid-boom qu’a créé Hatsune Miku, on ne compte plus le nombre de chansons postées sur Nico Nico Douga (site équivalant à Youtube, très populaire au Japon) et les adaptations ; nous pouvons prendre pour preuve le fait que le studio Ghibli serais intéressé de faire une adaptation en film d’une trilogie de chansons sous forme de long-métrage (Evil’s theatre par Mothy-p (/Akuno-p)), et les concerts officiels et amateurs partout dans le monde.

Chaque création est reprise et même améliorée, c’est un travail de groupe. Les compositeurs ayant reçu le titre honorifique de « –p » (producer) sont souvent devenus assez réputés pour la qualité de leur productions et ont même signé avec des labels connus (Le groupe Supercell a signé avec Sony Music Japan). De plus, ces mêmes « -p » ont vu leurs chansons éditées en CDs et être mises dans des jeux, comme le célèbre jeu de rythme Project Diva créé par SEGA et Crypton Future Media, dont il existe plusieurs versions, sur différentes consoles, smartphones et même une version Arcade qui bénéficie régulièrement d’améliorations.

Après le succès de ces jeux, la diva s’est vue propulsée au-devant de la scène et a joué avec des musiciens devant des milliers de spectateurs au Japon, mais aussi à Los Angeles en 2011, à Singapour, et plus récemment Taïwan et Hong-Kong. Lady Gaga s'est également intéressée à Miku puisqu'elle l'a placée en 1ère partie de son dernier concert en 2014.



Photographie lors du concert "Miku no hi Daikanshasai,
Final 39′s Giving Day" au Tokyo Dome City Hall.

La réputation du logiciel s’est même étendue jusqu’en Amérique, Europe et l’Asie, nous en avons pour preuve la rediffusion en différé du Mikupa Sapporo 2011 dans une salle française au Méga CGR de Torcy, un des avatars Vocaloid (Megpoid Gumi) est devenue la mascotte de l’émission Japan In Motion sur la chaine Nolife, et la sortie de l’album Supercell feat. Hatsune Miku dans les bacs, édités par Kaze/wasabi records.

De plus, les Vocaloid de Crypton ont été récemment placés sous les Creative Commons, ce qui permet à n’importe-qui de créer avec les Vocaloid de cette société. Voici comment un simple travail amateur peut devenir un succès mondial.

Publicité pour Google Chrome utilisant Vocaloid et Hatsune Miku (Musique par KZ(Livetune)), qui résume bien le phénomène.

Cette publicité a été la plus visionnée des publicités pour Chrome, plus visionnée même que celles ayant utilisé Lady Gaga et Justin Bieber, ce qui prouve que le nombre de fans de Vocaloid équivaut au moins au nombre de fans de stars « réelles ».

Et quand l’on parle de « Vocaloid », nous parlons aussi de toutes les personnes qui les créent: les producteurs, artistes et réalisateurs en tout genre.

Rédigé par Hiroki Tsudjui, Ariadne et Akhésa.